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17 décembre 2005

Bouteflika et l’obséquiosité de la presse algérienne


Quand il ne reformate pas les communiqués de l’APS, le « journaliste » algérien dévoile à son lecteur que l’Algérie est victime d’un complot international des super puissances impérialo-coloniales, que les Algériens s’inquiètent pour leur président, que Bouteflika est aimé de ses compatriotes ...Le lecteur a peur la première fois, s’amuse à la deuxième, et baille par la suite ... en attendant le prochain Dilem ...

En Algérie, le journaliste défend, paraît-il, la liberté de pensée et la démocratie. Quand les hordes barbues, nostalgiques du Khalifa, viendront restaurer l’ ordre, la discipline et les VRAIES valeurs musulmanes, il se dressera héroïquement armé de son seul stylo, et écrira que ce n’est pas bien. C’est du moins ce que l’on avait cru comprendre depuis l’assassinat de Tahar Djahout par un fanatique religieux.

En attendant son heure de gloire, le journaliste algérien doit noircir du papier pour gagner sa croûte. Seulement voilà : écrire des conneries à longueur de journée, ça n’est pas facile. Une bonne méthode qui a fait ses preuves depuis que la presse existe consiste à remettre en forme la propagande des « communiqués de presse » concoctés par l’agence de presse officielle : l’APS. Cette technique s’apelle courament le « re-writing » et est admise dans le milieu de la presse. Çependant elle est malhonnete vis à vis du lecteur, qui finit par trouver la ficelle un peu grosse et doute de l’indépendance de la presse, mais on ne peut pas tout avoir. En tout cas, ce n’est pas comme cela qu’on gagne le prix Pulitzer.

Abdelkrim Tazaroute du « journal » La Tribune arrive quant à lui a se distinguer par son obséquiosité inégalée, même par le quotidien d’état « El Moudjahid ». Ainsi en lisant son article surréaliste intitulé « Surf insidieux entre la préoccupation et la désinformation » je dois avouer que j’ai été pris d’un fou rire hystérique. Dès la première ligne l’auteur parle de la « quête désespérée des médias français de semer le doute auprès de l’opinion algérienne préoccupée par l’état de santé de son Président ». Parfois l’auteur se livre à d’invraisemblables contorsions, comme lorsqu’il affirme que « certaines déclarations énigmatiques qui, effectivement, peuvent faire l’objet de plusieurs lectures dont les plus inquiétantes ne sont pas à écarter ». M. Tazaroute nous rejoue carrément une séquence flash-back qui fleure bon la dictature islamo-stalinienne de Boumediene quand il dit que « Les médias français font fi des déclarations officielles algériennes dont celle rassurante du chef du gouvernement » ou encore lorsqu’il qualifie les interrogations de certains journaux français de « campagne de désinformation ». C’est le retour de la thématique du complot extérieur si chère aux républiques « couscoussières » du sud de la Méditerranée.

Un autre quotidien, La Nouvelle République , dans un style moins ridicule, reprend la déclaration du chef du FLN « Le Président continue à gérer les affaires du pays » et sur un air déjà connu nous siffle la même chanson : « la presse de l’Hexagone parle d’un état inquiétant du chef de l’Etat algérien » ; en ajoutant que « Tout cela ne fait qu’entretenir le doute des Algériens » .Toutefois le journaliste s’interroge tout de même sur « les services de communication de la présidence [..] qui a créé cette inquiétude ? » et sème lui même le doute en concluant que « Le ministre français a-t-il voulu laisser entendre qu’il existe une autre vérité que celle qui figure dans ledit bulletin médical ? ».

Pour terminer notre tour d’horizon de la presse dite « indépendante » d’Alger, feuilletons ensemble El Watan, l’ex très sérieux « quotidien de référence » dont le dirigeant, Omar Bellouchet, nous jouait il y a quelques années, sur les mêmes medias français qu’il dénonce actuellement, le numéro du pauvre journaliste persécuté par les terroristes islamistes. Il nous expliquait alors qu’il défendait la liberté de pensée et la démocratie et qu’il soutenait l’arrêt du processus électoral. El Watan donc, dénonce pour sa part « des déclarations faites par les responsables français » et relève que « la maladie du président de la République risque de devenir, au fil des jours, une affaire pour l’Etat français. » Le quotidien fini par conclure - devinez quoi ?- que cela « vient ajouter aux inquiétudes des Algériens. » Le couplet a beau changé c est toujours le même refrain.

Finalement, dans cette histoire, tout le monde est content : le lecteur qui s’ennuyait après avoir fini de lire son Dilem (qui lui mérite son salaire) ; le « journaliste » algérien qui a pu justifier son salaire en écrivant quelques conneries de plus et le régime algérien qui trouve nouvelle matière à amuser la galerie.

Quand il ne reformate pas les communiqués de l’APS, le « journaliste » algérien dévoile à son lecteur que l’Algérie est victime d’un complot international des super puissances impérialo-coloniales, que les Algériens s’inquiètent pour leur président, que Bouteflika est aimé de ses compatriotes ...Le lecteur a peur la première fois, s’amuse à la deuxième, et s’ennuie ensuite, en attendant le prochain Dilem ...

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