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17 août 2005

Dernier Round de négociations Aarch-Gouvernement à Alger : Le compte à rebours a commencé


« La question de la dissolution des APC élues en Kabylie et l’organisation d’élections partielles dans la région suscitent encore des réactions des formations politiques » estime Madjid Makedhi, journaliste à El Watan, dans un article intitulé « Partielles en Kabylie : Les pour et les contre ». En effet la parution du décret présidentiel portant sur la dissolution des Assemblées locales dans la région partage la classe politique, ainsi que la presse algérienne. Cette même presse se passionne également pour le dernier round de négociations Aarch-Gouvernement, qui s’annonce fort délicat.

Le très officiel quotidien d’état Horizon a ainsi fait part de deux décisions importantes prises lors du conseil des ministres du 10 août 2005. D’une part, la reprise en main des écoles privées qui « sont tenues de dispenser leurs enseignements en langue arabe ». D’autre part, la « reprise aujourd’hui du dialogue gouvernement-aârouch » avec « l’officialisation de tamazight en question ».

Pour sa part, le quotidien Le jeune indépendant fait état de ses doutes quand à la prise en charge de « l’officialisation de la langue Tamazight » en affirmant qu’il est « difficile de croire à l’aboutissement de cette démarche. Les propos tenus par le président de la République le 8 avril dernier, à l’occasion de la célébration de la première année de son deuxième mandat, en sont la preuve. « La langue arabe restera la seule langue officielle de l’Etat algérien et il n’y aura pas de concession là-dessus », avait déclaré le président Bouteflika ».

« Marge de manœuvre étroite pour Abrika » titre pour sa part La nouvelle République. Selon Malik Fohdil, « pour l’exécutif gouvernemental, le préalable d’un référendum populaire pour officialiser tamazight en tant que langue nationale » demeure. Le journaliste rappelle par ailleurs que « le RCD, le FFS, le MAK et les courants centristes dénient à Abrika toute représentativité estimant que les dialoguistes n’ont en main que les cartes que le pouvoir leur a données ». Finalement Malik Fohdil conclut que « la marge de manœuvre pour Abrika est étroite, car les cartes qu’il a en main ne lui suffisent pas pour imposer un point unilatéral à l’exécutif gouvernemental, celui de coupler le dossier sur les incidences des premières mesures au dossier explosif de la reconnaissance de Tamazight et de l’allocation chômage ».

Dans le même quotidien un autre journaliste, Sofiane Idjissa, fait remarquer que les élections partielles en Kabylie constituent une date essentielle pour les Aarchs dialoguistes car « sinon ils apparaîtraient comme n’avoir rien obtenu. Ils apparaîtraient même comme s’ils avaient été instrumentalisés ». « Le temps compte » donc pour Abrika qui se retrouve « au pied du mur ». Cela laisse supposer qu’ Abrika serait tenté d’accepter tout et n’importe quoi pour ne pas arriver les mains vides lors des prochaines échéances électorales.

Vers une officialisation de Tamazight sans référendum ?

Le scepticisme ambiant s’est estompé samedi dernier, quand El Watan a titré sur l’ « officialisation de Tamazight sans référendum, Ouyahya s’engage » en rapportant les propos de Djaâfer Abdeddou, membre du mouvement des archs de Bouira (CCCWB). Ce dernier déclare que « le principe de l’officialisation de tamazight est gagné ». « Le chef de l’Exécutif aurait accepté le principe de l’officialisation de cette langue sans référendum » selon une autre source dialoguiste.

Le journal Liberté confirme cette version en rapportant les propos des dialoguistes : « Nous avons réalisé une avancée considérable, et nous avons même, à présent, dépassé cette question de référendum que l’on considère comme une affaire classée ».

Vers une réouverture du dossier des victimes du printemps noir.

Les annonces optimistes pour le camp des dialoguistes s’accumulent. Liberté annonce « Réouverture des dossiers des victimes du printemps noir ». L’expression annonce quant à elle qu’ « un tribunal civil jugera le gendarme » qui a assassiné le jeune Guermah Massinissa. Même le Quotidien d’Oran, habituellement très prudent, grisé par l’euphorie ambiante, déclare que « le gendarme Meftari est convoqué, selon des sources sûres, par le procureur de la République du tribunal de Tizi Ouzou pour demain ». De plus l’auteur de l’article fait remarquer que « le plus surprenant dans cette affaire est la célérité avec laquelle des points de l’accord entre les aarchs et le chef du gouvernement sont mis en application. ».

Une opposition aphone.

Ce dernier round de négociations pourrait donc s’achever par le KO de la classe politique Kabyle (ou plutôt, comme ils se décrivent eux-mêmes, la classe politique « algerienne-avec-une-assise-plus-particulière-dans-la-région-de-Kabylie ») car Abrika aurait obtenu en quelques mois plus que les partis FFS-RCD en 15 ans d’exercice politique. Dans ce contexte, difficile de prêter attention aux partis politiques. Said Saadi continue « ses rencontres de proximité » dans l’indifférence générale, avec comme unique caisse de résonance le quotidien Liberté et ses articles s’assimilant à des « publi-reportages ». Quand au FFS d’Aït Ahmed, il n’oser même plus menacer d’organiser des meetings fautes de « marcheurs » (ou bien de militants tout court), même à Tazmalt qui a constitué jusqu’ici son meilleur réservoir. Il se borne à menacer de porter plainte auprès d’une hypothétique juridiction internationale.

Entre euphorie et crainte d’une énième désillusion.

Malgré l’euphorie ambiante, le doute persiste. Ces négociations soulèvent plus de questions qu’elles n’en résolvent. S’agit-il de simples promesses en l’air, dans un but électoraliste à court terme ? D’ailleurs il est à noter que le gouvernement n’a pas encore confirmé officiellement l’« officialisation de Tamazight sans référendum ». Toutes les informations rapportées par la presse émanent des Aarchs dialoguistes qui semblent très surs d’eux mêmes, mais dont les affirmations ne sont pas pour l’instant confirmés par des sources gouvernementales.

D’autre part qu’en est-il de la contradiction entre l’annonce, par des voies détournées, de l’officialisation de Tamazight et la généralisation, bien officielle cette fois-ci, de l’enseignement en langue arabe à l’enseignement privé ? Comment ne pas mettre en parallèle d’un côté une simple promesse faite à des délégués dos au mur et d’un autre, une contrainte administrative officielle entraînant une sanction judiciaire immédiatement applicable aux contrevenants...



La Chronique du [CyberKabyle].

09 août 2005

Quatrième Congrès Mondial Amazigh à Nador dans le Rif

Le quatrième Congrès Mondial Amazigh, une organisation non gouvernementale chargée de la défense des droits politiques, économiques et culturels des peuples berbères d’Afrique du Nord, s’est déroulé du 5 au 7 août 2005 à Nador la capitale du Rif. Le CMA est une instance dont les membres sont élus par plus de 500 représentants des associations venant de divers pays d’Afrique du Nord, d’Europe et d’Amérique du Nord.

« Pourquoi Nador ? Suite à l’annulation des visas avec l’Algérie, les ONG berbères ont saisi la balle au bond en proposant la tenue de leur congrès au Rif et non à Almeria, comme cela était prévu » estime le quotidien marocain L’économiste. Contraints dans le passé de réunir leurs congrès à l’étranger, c’est la première fois que les membres du Congrès Mondial Amazigh se rencontrent sur le territoire de Tamazgha suscite la satisfaction, mais aussi des craintes dans les colonnes de la presse marocaine.

Le très sérieux L’économiste a ainsi consacré deux articles à la tenue de ce congrès. Au niveau des satisfactions, Mohamed Boudarham du quotidien Aujourd’hui le Maroc, avance l’explication « de la flexibilité des procédures administratives au Maroc » et de « la décision de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, en juillet 2004, d’exonérer les ressortissants algériens de visa d’entrée sur le sol marocain ». Et pour le démontrer le quotidien cite les paroles du président du CMA Belkacem Lounès « Il y a donc dans ce pays des espaces de liberté qui se sont offerts ».

En revanche, Mohamed Boudarham, qualifie de « dérapage » et de « divagations », les propos de Belkacem Lounes qui souhaite « manifester une solidarité » avec une région sujet à une « politique de marginalisation et de répression » cinquante ans après l’indépendance.

Pour en avoir le cœur net, L’économiste donne la parole à Belkacem Lounés dans un entretien de Nadia Lamlili intitulé « Rendez-nous ce qui nous appartient ! ». Cette dernière en préambule de son article note que « les propos de Belkacem Lounès sont parfois très virulents » et que « ce Kabyle représente la ligne des durs dans le mouvement amazigh ». Ces remarques sont d’autant plus surprenante que Belkacem Lounès ne cachait jusqu’alors pas ses liens avec le Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD), un parti qui se flatte de ses connexions avec des factions de l’armée algérienne. De plus, lors du Le Forum Social Européen de Saint Denis en 2003, c’est du bout des lèvres, et après une intense pression de l’Union des Kabyles de France (UKF), qu’il a prononcé le mot « génocide » pour qualifier les exactions des événements appelés le « Printemps Noir ».

« Le droit des peuples à l’autodétermination »

Aux questions ayant trait à l’autodétermination, il confie que « notre instrument de travail c’est le droit international dans lequel figure en bonne place le droit des peuples à l’autodétermination. Tel qu’il est défini par les chartes et conventions internationales, il signifie la promotion de la liberté pour les personnes et pour les peuples et le refus de la domination, sous quelque forme qu’elle soit. ».

La journaliste Nadia Lamlili, use du vieil argumentaire du « des milliers d’années de brassage culturel ». Ce thème sous-entend que les militants berbères sont des empêcheurs de brasser en rond, et donc obsédés par la pureté raciale et donc finalement racistes. Les militants berbères se retrouvent sommés de démontrer qu’ils ne sont pas racistes, mais tolérants et que finalement ils sont très heureux de vivre sous domination arabo-musulmane. Belkacem Lounes réplique du tac au tac en demandant « Curieusement, tous les Etats nord-africains parlent de brassage culturel mais sans jamais expliquer comment ils passent de cette pluralité linguistique et culturelle, bien réelle, à leur définition de l’identité nationale fondée uniquement sur l’arabité et l’islamité ? Pourquoi la Constitution ne reconnaîtrait-elle pas ce « brassage », cette diversité culturelle et linguistique du Maroc ? Pourquoi 4 chaînes de TV en arabe et pas une seule en tamazight ? Pourquoi des centaines de conférences, colloques, séminaires nationaux et internationaux sur l’arabité et presque rien sur l’amazighité ? ». Il ajoute « Pour le lobby panarabiste, le brassage signifie certainement, non pas reconnaissance et promotion de la diversité culturelle mais bien assimilation forcée des Amazighs à l’identité arabe ».

Terres spoliées et fédéralisme.

Sur un ton plus neutre, Aziz Khamliche du quotidien Le Matin (celui du Maroc), note que « les thèmes, qui revêtent un caractère particulier pour les congressistes, sont ceux ayant trait au fédéralisme » et aux « terres spoliées ». Toujours selon le quotidien « l’influence de la revendication kabyle, qui se confirme au fil des temps, incite les Algériens à être favorables à une thèse d’autonomie pour « le peuple amazigh », alors que pour les Touareg, c’est l’abolition des frontières qui prime ». Toutefois il laisse planer l’hypothèse d’un complot européen en affirmant que « force est de constater que la plupart des ONG amazigh se trouvent en Europe, ce qui incite à croire qu’elles ne sont pas autonomes dans leur action ».

La questions de l’autodétermination semble obséder les journalistes comme le rapporte la Dépêche de Kabylie : « Une journaliste marocaine de l’hebdomadaire El Oubour a demandé à Belkacem si la Kabylie demande vraiment le statut d’indépendance et à l’orateur de réfuter cette idée ». La réponse de M. Belkacem bien que diplomatique n’a pas du beaucoup la rassurer : « Ce ne sont pas les frontières qui font la fraternité mais c’est plutôt le respect mutuel. Par contre l’autonomie régionale est un sujet très sensible pour nous. C’est une manière de restaurer et de préserver notre identité ».

Les deux partis FFS et RCD n’ont pas été à la hauteur.

La suite de l’article de la Dépêche démontre la réelle évolution du discours du président du CMA depuis ce fameux Forum Social Européen de Saint Denis en 2003 : « Interrogé sur les deux partis du FFS et du RCD, qui représentaient la Kabylie à un certain moment de l’histoire, le conférencier a déclaré que ces deux partis avaient leur base en Kabylie, mais la population a considéré qu’ils n’ont pas été à la hauteur et n’ont pas porté leurs revendication ni défendu les intérêts du peuple. C’est pourquoi, actuellement ces deux partis existent toujours mais ils ont perdu beaucoup de leur base » avant de conclure que « les partis qui sont venus après n’ont pas été plus démocratique que le parti unique. Lorsque le député gagne 40 fois plus que le simple fonctionnaire ou un instituteur, on ne peut espérer grand-chose. Avant d’être élus, ils sont avec le peuple et après, il prennent la fusil vers une autre planète ».

Cette évolution dans la tonalité du discours du CMA fait grincer quelques dents. Ainsi Le Soir d’Algérie rapporte les propos virulents de Moh Si Belkacem, l’un des quatre vice-présidents de l’organisation. Ce dernier confie au quotidien du soir « Pourtant, depuis mon entrée dans l’organisation, lors du congrès de Lyon en 1999, personne ne s’est offusqué de mon appartenance à un parti politique, le RCD. Une affiliation que, en tant que personne physique, ne m’interdisent pas les statuts du Congrès. ». Autre grief retenu par le vice-président algérien contre Belkacem Lounès, le fait que ce dernier utilise dans ses déclarations et interviews le concept de « peuple kabyle ».

Le 4 eme congres Mondial Amazigh s’est finalement clos dimanche soir après trois jours de débats. Les congressistes ont élu, en assemblée générale, le Conseil fédéral qui, à son tour a élu le bureau mondial du CMA, dont voici la composition : - Président : Lounès Belkacem - Vice-présidents : Rachid Raha, Khalid Zerrari, Houcine Azem, Jaime Saenz, Chekna Aghamate - Secrétaire général : Ahcene Boztine - Secrétaire général-adjoint : Zahir Moussafri - Trésorier : Abdallah Fandi - Trésorier-adjoint : Saïd Zamouche. .



Les Chroniques du [CyberKabyle].

05 août 2005

Cartographie : Tamurt Imazighen et Kabylie au XVIIIème siècle

A l’heure actuelle, on ne désigne plus l’Afrique du Nord que par le terme de Maghreb qui signifie "couchant" en langue arabe (et qui désigne l’Ouest du "monde arabe", l’Est étant le "levant", le Machrek). Il est bon de rappeller que cela ne fut pas toujours ainsi et que les Berbères (Imazighen) eurent eux aussi leur place sur les cartes du monde.

Nous proposons aux lecteurs de consulter la Carte de la Barbarie, de la Nigritie et de la Guinée établie en l’an 1707 par le cartographe français Guillaume Deslisle (1675-1726) et disponible sur le site de la Bibliothèque nationale de France.

Voici tout d’abord une vue d’ensemble de l’Afrique du Nord. Il y est clairement indiqué, sur toute la largeur de la carte, recouvrant les différentes entités politiques (royaumes d’Alger, de Tunis...) que cette région est la Barbarie, c’est à dire le Pays des Breberes (Berbères, Imazighen). Une preuve de plus que, encore au XVIIIème siècle, à peine plus d’un siècle avant la colonisation française, l’Afrique du Nord était toujours une terre amazigh.

Ensuite, nous avons effectué un zoom sur la partie de la carte représentant l’actuelle Kabylie. Il apparaît clairement que cette zone, du moins dans sa partie montagneuse, ne dépend pas du Royaume d’Alger, alors sous domination turco-ottomane, mais bien d’un royaume autochtone, le Royaume de Couque. Tous ceux qui connaissent l’histoire de la Kabylie reconnaîtront là le royaume kabyle de Koukou, fondé au XVIe siècle sur les contreforts du Djurdjura par la famille maraboutique des Belkadi, lesquels refusèrent obstinément la domination ottomane. On peut également noter sur la carte la mention, dans les Aurès, d’un royaume de Labez (Lambèse ?), ce qui laisserait à supposer que les deux grandes zones amazi ? de cette région, la Kabylie et le pays Chaoui, étaient toutes deux autonomes et même indépendantes au début du XVIIIème siècle.



Les Chroniques du [CyberKabyle].