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19 avril 2006

Chirac-Bouteflika : Et soudain un nain connu vous offre des fleurs

Vous vous souvenez peut-être, il y a plusieurs années, de cette publicité télévisée : c’était pour un parfum. Une femme s’asperge copieusement de parfum, et durant une de ses promenade, elle croise un homme qui soudain, sous l’influence supposé du parfum, est victime d’un coup de foudre , court rechercher un fleuriste, achète un bouquet et part a la recherche de la femme, avec à la fin le slogan « Et soudain un inconnu vous offre des fleurs ».

J’y ai repensé l’autre jour en revoyant Douste-Blazy ministre des affaires étrangères revenir tête basse de sa visite en Algérie. J’avais encore en mémoire ces images de la visite de Chirac en Algérie en mars 2003. Celui-ci n’avait pas hésité à enjamber une montagne de cadavres kabyles pour rendre service à son « ami » Bouteflika pour une « visite d’Etat ». Cette visite avait l’allure de « Tintin au Congo », avec ses manifestations populaires « spontanées », ses rues bardées de drapeaux français et ses quidams en quête d’un visa. Si cette visite avait lieu aujourd’hui j’aurais intitulé cet édito "Et soudain un nain connu vous offre des fleurs". D’ailleurs c’est ce que j’ai fait...

Pour rendre service à son ami Bouteflika, Chirac n’a pas ménagé ses efforts depuis lors : retour de la desserte de l’Algérie par Air France, « Année de l’Algérie en France » ( avec l’argent du contribuable français, d’origine kabyle y compris), soins médicaux gratuits pour de "petits" problèmes d’estomac ( avec l’argent du contribuable français, d’origine kabyle y compris). Le stand algérien au salon du livre payé par le contribuable français, kabyle y compris. Décidément rien n’est trop beau pour Bouteflika.

Après 3 ans de danse du ventre obséquieuse que reste il de tout ça ? Si peu si l’on en croit la presse algérienne. Ainsi Mounir Boudjema (Liberté, 15 avril 2006) dans un éditorial intitulé « Pré-carré ? » affirme que « Le huis clos avec la France est terminé » en reprenant les mots du ministre algérien des affaires étrangères : « les États-Unis d’Amérique ont plus de poids que la France en Algérie ». Le journaliste qualifie cette sortie de « redistribution de cartes sans précaution langagière ou sémantique qui traduit parfaitement l’état d’esprit des dirigeants algériens, Bouteflika en tête ».

L’éditorialiste conclut que « si Bouteflika a autorisé Bedjaoui à porter ce coup terrible à “l’arrogance” française au Maghreb, en particulier en Algérie, c’est que le président algérien sait que les rapports de force, aussi bien internes d’externes, sont en sa faveur et vont le demeurer ».

Ce point de vue est partagé par El Watan, sans les fioritures des (pseudos) "analyses" du Monde, le "quotidien français de référence". El Watan parle de « l’échec du ministre français des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy ». Le quotidien présente les choses sous l’angle de la rivalité franco-américaine en rapportant que « Condoleezza Rice exhibe devant les caméras l’autre traité d’amitié paraphé voilà plus de deux siècles (1795) entre la régence turque d’Alger et les autorités américaines », rappel qualifié de « pied de nez à la France » (El Watan, 15 avril 2006).

L’éditorialiste ajoute que « l’Algérie, financièrement à l’aise, voudrait se payer une cure d’opposition à la France chez l’Oncle Sam » avant de souligner que cette initiative provient de Bouteflika lui même : « La volonté de l’Algérie de s’émanciper diplomatiquement de la mainmise française constitue la pierre angulaire de la politique étrangère de Bouteflika, qui privilégie désormais l’approche pragmatique à celle historique ».

Enfin, pour conclure ce tour d’horizon de la presse algérienne, le talentueux chroniqueur Mustapha Hammouche (Liberté, dimanche 16 Avril 2006) pose franchement la question : « À quand le traité d’amitié algéro-américain ? » Il s’amuse malgré tout du discours schizophrène des autorités algériennes en rappelant qu’« On ne sait pas où placer dans cette camaraderie le reproche qu’on leur fait d’occuper le pays frère d’Irak et d’écraser nos frères palestiniens par leur appui illimité à l’état d’Israël ».

Ensuite Mustapha Hammouche, un des plus fins analystes de la scène politique, s’interroge : « Où se situe alors le fruit de la visite de Bedjaoui à Washington ? », en apportant un élément de réponse. Il a « demandé qu’on fasse un plus grand effort, côté américain, pour que les opérateurs économiques, les industriels, les investisseurs s’intéressent à d’autres secteurs que ceux des hydrocarbures et de l’énergie ». D’où sa conclusion que devant « l’absence de résultats internes, l’activité diplomatique semble servir de thème du discours populiste ».

Le journaliste conclut finalement sur un ton doux-amer que « quand il s’agit de se glorifier et de susciter notre reconnaissance pour la place retrouvée dans “le concert des nations”, le pouvoir fait un évènement politique d’une consultation ordinaire ; et quand il s’agit d’échecs diplomatiques, il exacerbe notre ressentiment envers le partenaire défaillant ».

Finalement le bilan de Chirac sur le dossier algérien est l’image de son mandat : le néant absolu ! Comme avec la Chine, la politique du tapis rouge et le léchage de bottes est bien peu efficace diplomatiquement : cela n’inspire que mépris pour celui qui en use.



La Chronique du [CyberKabyle].

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